Dominique Massaut

Liège, une source belge du fleuve Poème ?

in Le Soir du mercredi 27 janvier 1999

Liège, une source belge du fleuve Poème ?
Article de Pascale Haubruge
in Le Soir du mercredi 27 janvier 1999

Liège, une source belge du fleuve Poème ?
HAUBRUGE,PASCALE
Page 39
Mercredi 27 janvier 1999

Liège, une source belge du fleuve Poème ?

Les poètes sont-ils d’une ville plus que d’une autre ? Est-il des coins de pays particulièrement propices aux ardeurs plumitives ? Les cités traversées par des fleuves attirent-elles les poètes ? Toujours est-il que Liège s’illustre en poésie depuis pas mal d’années.
« Nouvelle poésie en pays de Liège » vient le confirmer. Suite d’un ouvrage paru en 1994, cette anthologie met sous la dent des lecteurs les noms et les poèmes de dix-huit jeunes auteurs pour qui Liège n’est pas rien.
Selon Rosano Rosi, la rime en bord de phrase, la ville où il demeure
Est une ville grise
Au bord d’un fleuve gris et dont le gris
[réseau, une ville sans nom sans Seine [et sans Tamise
Et dont le gris réseau des rues des toits
[grosso modo
Le ciel imite avec îles de nuages
Avec fleuves de pluie et grands-rues
[ruisseaux.

La grisaille colle au ciel. La pluie fait parler d’elle. Et les rues n’ont pas toujours le coeur à rire. Cependant le soleil n’oublie pas de prendre l’air dans les mots des poètes.
Je ne suis qu’un cheval contraire
Mais je rue dans le sens du soleil,

signale Tristan Sautier.
Dominique Massaut, en soif d’amour à vivre, attend pour sa part les éclaircies et interroge :
Pourrons-nous pressentir ensemble Le bout de l’été Avec tes seins qui le remplissent ?
Le poète souligne les clartés, les heures suspendues et l’onde des vents blonds. Né à Liège en 1959, il valse au bal des parapluies et salue d’une plume à tendresses les soleils gitans.
« Nouvelle poésie en pays de Liège » suit le fil des ans. Les auteurs s’y succèdent selon la chronologie de leur date de naissance. Né en 1951, Roland Counard y fait dès lors figure d’ancêtre. La fragilité des jours traverse sur un air de nostalgie les poèmes de ce bien jeune vieux de la vieille. Nommé Gaëtan Rousselet, le petit dernier a quant à lui vu le jour en 1976. Il s’invente un château où le réel est à la mesure de ses désirs. Cet ordre vaut ce que valent les ordres. Il a du moins le mérite de laisser le mot de la fin aux talents naissants. Mais la poésie est ainsi faite qu’elle annule la fin par les faims. Leurs fringales assurent aux plumitifs de tous âges des espaces sans cesse à défricher.
Rudi Lippert - étiqueté année 1952 - n’a pas son pareil pour mettre le réel sens dessus dessous. Depuis l’observatoire de son ironie verbale, il secoue les puces du lot commun et livre de courts textes marrants qui expriment l’air de rien le suc de l’existence. On embrasse parfois plus justement la réalité brute en flirtant avec l’absurde.
Aki Roukas est plus lyrique. Alexandre Czapla conjuge souvenirs et quotidien. Luc Louwette et Gérard Purnelle y vont de leur ritournelle. Serge Delaive est du voyage. Laurent Demoulin se tourne vers hier pour interroger son âge. Virginia Dafos s’avère quant à elle la seule femme de la bande. Au beau milieu de l’anthologie, on se plaît aussi à retrouver les mots sonnants de Karel Logist. Un inventeur d’images, musicien du langage, expert en rythme sensibles. La dérision pour bagage et le coeur à l’ouvrage, il est de ces poètes qui impriment dans les mémoires leurs mélodies aux forces simples porteuses de vérités battantes.
Dans la génération des poètes nés au cours des années septante, on rencontre enfin Nicolas Ancion et son inventivité verbale, Frédéric Saenen, Pascal Leclercq, Olivier Coyette et Gaëtan Rousselet. Cinq poètes pour plus de mondes encore.
Parmi les inscrits au programme de « Nouvelle poésie en pays de Liège », certains sont voyageurs tandis que d’autres trouvent les poèmes sur le pas de leur porte. La révolte gronde chez l’un quand une nostalgie douce passe dans les phrases de son confrère en poésie.
Quelques-uns prisent la rime alors qu’ailleurs s’inventent des rythmes moins visibles. Mais tous cherchent ardemment une intersection entre mots et émotions. Ce peu commun dénominateur commun est le flambeau secret que se passent l’un à l’autre les poètes de Liège - et d’ailleurs.
PASCALE HAUBRUGE
« Nouvelle poésie en pays de Liège », l’Arbre à paroles, 248 pp.


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